Dr Cécile Winter 

La rhinoplastie est un geste esthétique fréquent et d’une grande complexité. L’objectif est ici de présenter une technique fiable et préservatrice, du projet jusqu’au résultat. 

La rhinoplastie anatomique conservatrice (RAC) fait partie des rhinoplasties de préservation. L’objectif est de réduire au maximum l’agression des tissus par la chirurgie. Plus qu’une technique, c’est aussi une philosophie : rendre la rhinoplastie indécelable. Comment ? En gardant les points d’équilibre nez/visage et en préservant certaines de ses spécificités. La rhinoplastie a historiquement deux écoles, la voie fermée et la voie ouverte. Les adeptes de la voie ouverte apprécient la visualisation des structures, ceux de la voie fermée l’absence de zone cicatricielle extensive (toutes les zones décollées) et de cicatrice cutanée. 

En scindant le nez en deux zones opératoires, le dorsum et la pointe, la RAC allie les bénéfices des deux techniques, ouverte et fermée. Cela permet le contrôle visuel du travail de la charpente ostéo cartilagineuse, tout en préservant les ligaments entre la pointe le dorsum et la peau, pour un résultat fonctionnel et naturel. Ainsi, la RAC fait partie des rhinoplasties de préservation.

Les intérêts de cette technique sont son adaptabilité aux différentes anatomies et sa valeur prédictive positive du projet jusqu’au résultat tardif. En voici les points clefs.

Le projet photo : 

La rhinoplastie est un travail d’équipe entre le chirurgien et le patient. La première question est d’ordre fonctionnel : le nez respire-t-il ? Ensuite vient l’esthétique : quels sont les deux mots qui résument les disgrâces du nez aux yeux du patient ? L’objectif est de mettre en valeur les belles zones pré existantes du nez ; pourquoi les détruire par une voie ouverte pour les reconstruire à l’identique et risquer de faire moins bien que la nature ? Le projet photo sera fait dans les trois plans ; de profil, de face et de trois quart, en statique et en dynamique. Cela permet au couple chirurgien/patient de confronter les désirs de l’un avec les réalités techniques de l’autre. Pour préserver l’harmonie nez/visage, le point clef est la conservation de la hauteur de la racine du nez. En effet, celle-ci donne l’intensité au regard. Le projet doit être réaliste. Pour cela mieux vaut adapter la hauteur et la longueur du dorsum à la projection réelle de la pointe que l’inverse. La projection réelle correspond au sommet des triangles mous, pas des dômes. La pointe doit rester naturelle. Elle peut être tourner vers le haut, affi née, symétrisée, une fente centrale peut être corrigée… ce qui est important est de garder de la douceur dans ses courbes pour rester naturelle.

La technique le dorsum :

Pour les patients, cette technique est sans cicatrice cutanée. Une première voie d’abord est réalisée en interne entre la pointe et la cloison (septum). Cela permet de traiter la longueur et la hauteur septale ainsi que sa rectitude et une possible obstruction nasale. Les cartilages triangulaires (cartilages latéraux du dos du nez) sont libérés du septum et de leurs insertions osseuses uniquement au niveau de la zone d’exérèse osseuse. Ainsi, l’ablation de la bosse osseuse sera réalisée en préservant leur intégrité. Le toit osseux sera refermé par des ostéotomies obliques et basses après infiltration muqueuse pour la préserver et éviter tout V inversé. Pour obtenir un dorsum harmonieux sur la ligne de profil, de face et de trois quart, les cartilages triangulaires seront suturés au septum de façon stable avec du PDS 5.0. On commence par les positionner en flaps (autogreffe reproduisant leur forme naturelle avec une incision longitudinale non transfixiante). Leur plicature doit correspondre à la hauteur du septum en haut et un demi millimètre en dessous vers la pointe pour bien définir le supratip. Ainsi, on obtient un tiers moyen de forme naturelle et on maintien une bonne respiration dans le temps en préservant la valve interne. Le dorsum ainsi fixé repose pendant le temps de travail de la pointe. Cela laisse le temps à la peau (peu décollée) de se replaquer sur la charpente ostéo cartilagineuse. De ce fait, cela évite les irrégularités post-opératoires car elles seront vues et donc immédiatement corrigées. Le taux de reprise chirurgicale est ainsi largement abaissé.

La pointe :

Les incisions sont à l’intérieur et étendues le long du rebord inférieur du cartilage alaire (ce sont les 2 cartilages formant la pointe, un droit et un gauche) et s’étirent de leur extremité au rebord interne des dômes. Les cartilages seront décollés sur leur face supérieure dans un plan avasculaire. Ainsi les ligaments de la scroll area (qui relient le dorsum au bord postérieur de la pointe et à la peau), le ligament de Pittanguy (qui relie la cloison à la pointe et la peau au niveau du supratip) et les ligaments inter-domaux (entre les cartilages droit et gauche de la pointe) ne seront pas détruits. Cela permet une bonne visibilité per opératoire du résultat en maintenant la peau sur la charpente du nez mais aussi une conservation de la respiration en préservant les soutiens de la pointe.

Les cartilages seront d’abord travaillés par un résection postéro céphalique minimale afin de définir le supratip et la largeur du lobule tout en maintenant le support latéral. Ensuite, des plicatures trans et inter domales postérieures seront réalisées sous contrôle de la vue pour obtenir de beaux triangles mous et avoir une belle définition de la pointe. De cette façon, la valve externe sera préservée pour bien respirer. La rotation et la déprojection de la pointe, la convexité des crues latérales par excès de longueur (qui pourrait entraîner un excès d’ouverture des seuils narinaires), pourront être traitées par une incision très distale des crues latérales avec préservation muqueuse et glissement à la demande.

S’il existe une pointe en goutte par verticalisation des cartilages de la pointe, une rotation pourra être associé au glissement. Ce geste est toujours fixé par un point trans muqueux résorbable. Si un soutien de la pointe est nécessaire, il peut être facilement réalisé par la mise en place de diced cartilage au niveau de l’épine nasale, ce qui évite de déstructurer la columelle. La mise en place d’un greffon columellaire est possible mais rarement nécessaire. Un point lache entre la columelle et le septum va finir de stabiliser le montage avec un PDS 5.0 et évite une redescente de la pointe en post-opératoire. Ainsi, le travail de la pointe est au maximum conservateur, autant au niveau des tissus mous que des cartilages, et au maximum stabilisé, comme pour le dorsum.


La rhinoplastie anatomique conservatrice, par ses décollements ultras limités et le travail sur deux zones séparées, permet de voir les reflets lumineux en per opératoire, et ainsi d’avoir une vision réaliste du nez pendant l’intervention.

La préservation des tissus mous et des ligaments conserve la fonction respiratoire et permet au nez de bien vieillir. C’est une technique fiable, rassurante pour le chirurgien et le patient, du projet jusqu’au résultat.

 

Dr Cécile Winter : Anatomiste, chirurgien et médecin esthétique de la face et du cou, experte internationale. Passionnée d’anatomie du visage, d’esthétique, de rhinoplastie et d’enseignement universitaire. A Nice, les Pr Castillo et Dr Kestemont ont développé la voie marginale étendue. Depuis 2012, grâce au Dr Baris Cakir et ses facettes lumineuses, j’ai travaillé ce double abord.

Plus d’informations : docteurcecilewinter.com 

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