Dr Dominique Aknin et Dr Jean-François Bezot
Quand équilibre rime avec confort intime et bien-être féminin.
Les dyspareunies dues à des infections vaginales, que ce soient des vaginoses, mycoses, ou déséquilibre de la flore, sont un motif très fréquent de consultation en gynécologie, et entrainent une gêne fonctionnelle importante, avec souvent une auto-médicalisation entraînant en retour une fragilisation de la muqueuse vaginale par appauvrissement de sa flore saprophyte naturelle. Le microbiote vaginal est un écosystème microbien complexe, majoritairement composé de bactéries du genre Lactobacillus, essentiel au maintien de la santé gynécologique. Il joue un rôle primordial dans la protection contre les infections, l’équilibre immunitaire et la fertilité. Sa composition varie au cours du cycle sous l’influence des hormones ovariennes, en raison de certains traitements comme la pilule contraceptive, les antibiotiques ou les corticoïdes, ou encore par un manque ou excès d’hygiène.

Composition du microbiote vaginal
Essentiellement représenté par des bactéries lactiques, il présente cependant une diversité interindividuelle influencée, par des facteurs hormonaux et environnementaux.
Les bactéries dominantes : les Lactobacilles
Les Lactobacillus (Flore de Döderlein) représentent généralement 70 à 90 % du microbiote vaginal chez une femme en bonne santé. Parmi les espèces les plus courantes :
• Lactobacillus crispatus : associé à un microbiote stable et protecteur.
• Lactobacillus iners : moins stable, il est souvent retrouvé en transition vers un état dysbiotique.
• Lactobacillus jensenii : producteur d’acide lactique et d’autres antimicrobiens naturels.
• Lactobacillus gasseri : impliqué dans la protection contre certaines infections vaginales.
Autres bactéries commensales et opportunistes

D’autres micro-organismes coexistent, jouant parfois un rôle pathogène en cas de déséquilibre :
• Gardnerella vaginalis : impliquée dans la vaginose bactérienne, capable de former un biofilm pathogène.
• Atopobium vaginae : fréquemment associé à la vaginose bactérienne persistante.
• Prevotella spp., Mobiluncus spp. : bactéries anaérobies proliférant dans les états dysbiotiques.
• Candida albicans : champignon impliqué dans les mycoses vaginales.
Rôle du microbiote vaginal dans la santé féminine
Le microbiote vaginal assure plusieurs fonctions essentielles :
• Maintien du pH acide
Les lactobacilles produisent de l’acide lactique, maintenant un pH vaginal entre 3,8 et 4,5. Cet environnement acide limite la croissance de pathogènes opportunistes comme Escherichia coli ou Staphylococcus aureus.
• Production de bactériocines et d’agents antimicrobiens
Certains Lactobacillus synthétisent des bactériocines, des peptides antimicrobiens capables d’inhiber les bactéries pathogènes. De plus, ils produisent du peroxyde d’hydrogène (H₂O₂), qui possède une activité antimicrobienne contre certaines bactéries anaérobies.
• Compétition avec les pathogènes
Les lactobacilles adhèrent aux cellules épithéliales vaginales, empêchant l’implantation de bactéries pathogènes. Ils interfèrent également avec les biofilms pathogènes, notamment ceux de Gardnerella vaginalis.
• Modulation du système immunitaire
Le microbiote vaginal interagit avec le système immunitaire en stimulant la production de cytokines et en modulant la réponse inflammatoire. Un microbiote équilibré réduit l’inflammation chronique, et limite les infections récurrentes.
Dysbioses vaginales et conséquences pathologiques d’un déséquilibre de la flore vaginale
Elles sont présentes chez 30% des femmes non ménopausées. Lorsque l’équilibre du microbiote vaginal est perturbé, diverses pathologies peuvent apparaître :
• Vaginose bactérienne
La vaginose bactérienne est caractérisée par une diminution des lactobacilles et une prolifération de bactéries anaérobies (ex. Gardnerella vaginalis, Atopobium vaginae). Elle se manifeste par des pertes vaginales malodorantes et abondantes, et un pH vaginal supérieur à 4,5. Elle augmente le risque d’infections sexuellement transmissibles et de complications obstétricales, avec tendance à la récidive voire la chronicité.
• Candidose vaginale
La prolifération excessive de Candida albicans est souvent favorisée par un déséquilibre du microbiote (prise d’antibiotiques, grossesse, immunosuppression). Elle entraîne des démangeaisons, des brûlures et des pertes blanches épaisses.
• Impact sur la fertilité et la grossesse
Un microbiote vaginal déséquilibré est associé à un risque accru de fausses couches, de prématurité et d’infertilité. Certaines bactéries pathogènes comme Ureaplasma urealyticum peuvent affecter la viabilité des spermatozoïdes, et la réussite des fécondations in vitro.
Chez l’homme également, certaines souches sont associées à des spermes de moindre qualité (Prevotella, Pseudomonas et Anaerococcus).
Facteurs influençant le microbiote vaginal
• Hormones : Les œstrogènes favorisent la croissance des lactobacilles en stimulant la production de glycogène, leur substrat principal. La pilule oestro-progestative modifie également cet équilibre. Après la ménopause, la diminution des œstrogènes entraîne une réduction des lactobacilles, et une augmentation du pH vaginal, donc une moindre résistance aux infections.
• Sexualité : Les rapports sexuels fréquents, le sperme (pH alcalin) et les partenaires multiples modifient la composition du microbiote.
• Antibiotiques : Ils peuvent détruire les lactobacilles et favoriser la croissance de pathogènes opportunistes. Le maintien d’un microbiote intestinal équilibré, notamment via l’utilisation de souches productives de butyrates, comme CBM 588, pourrait constituer une approche préventive dans les candidoses vulvo-vaginales récidivantes.
• Hygiène intime : Le rectum est un réservoir important de lactobacilles à tropisme vaginal, leur passage dans la cavité vaginale se fait par voie externe via le vestibule. L’usage excessif de produits antiseptiques ou de douches vaginales altère l’équilibre du microbiote.
• Stress : L’augmentation du cortisol induit par le stress chronique entraîne une baisse du glycogène qui est à l’origine de l’acide lactique.
• Alimentation et probiotiques : Certains aliments riches en probiotiques (Lactobacillus rhamnosus, Lactobacillus reuteri) peuvent aider à maintenir un microbiote vaginal sain. Les fibres des légumes et des fruits frais jouent un rôle très important dans la production intestinale d’un microbiote riche et varié, garant d’une bonne immunité.
• Surpoids, origine géographique et exposition aux particules fines : Ce sont différents facteurs pouvant influer le bon équilibre de la flore vaginale.
En cas d’infections vaginales chroniques, le recours à l’analyse du prélèvement en laboratoire est utile, et grâce à des nouvelles avancées techniques sophistiquées, telles que le séquençage à haut débit (New Generation Sequencing des laboratoires Cerba), une classification précise des différentes souches présentes dans la flore vaginale a été élaborée, (classification de Ravel de I à V, dont le groupe IV signe un microbiote pathologique), et cela représente une avancée significative dans la compréhension des dysbioses, de leurs répercussions sur le plan clinique et des options thérapeutiques.
Dr Dominique Aknin

Gynécologue Médicale. CES de Stérilité. DU d’Echographie Gynécologique. DU de Techniques d’Injections et de Comblement. DU de Médecine Anti-Age Intéressée par
une prise en charge globale de la femme, de sa santé intérieure à l’optimisation de son capital beauté.
Plus d’informations : drdominiqueaknin.fr
Dr Jean-François Bezot
Biologiste médical. Docteur en pharmacie, Faculté de pharmacie de Paris. Ancien interne des
Hôpitaux de Paris. Spécialisé depuis 1988 en biologie anti-âge et en protéomique fonctionnelle. Membre définitif de la Société Française de Médecine Esthétique. Conférencier international. Chargé de cours au DUMAA (Université Paris Créteil).
Plus d’informations : biopredix.com