Dr Isabelle Rousseaux

Beaucoup de choses ont été dites et publiées sur les effets secondaires (ES) des injections d’acide hyaluronique (AH).

Tous les effets secondaires possibles des AH réticulés, leurs prévention et traitements doivent être connus des injecteurs, il sera bon d’avoir un référent si besoin. Je n’ai pas fait d’études académiques sur le sujet mais j’écoute des médecins depuis des années et vous propose une synthèse pratique. Cet AH modifié va mettre un certain temps à être totalement éliminé, selon sa réticulation, la quantité injectée, les niveaux et mode d’injection, ce qui explique que des ES puissent survenir après des années.

Il semble logique qu’un produit, certes naturel à la base, mais modifié ensuite, puisse entraîner des réactions quand il est injecté dans la peau : 

  • Le niveau de réticulation élevé va donner des AH avec une durée de vie longue car, les processus d’élimination sont ralentis, le revers de la médaille : ils seront difficiles à traiter avec la hyase (6).
  • La quantité injectée va jouer beaucoup, la peau étant susceptible de réagir plus si gros bolus d’AH : on pourra parler de gros travaux au-dessus de 4 seringues, moyens entre 2 et 4, légers en dessous de 2.
  • Le niveau d’injection est aussi très important : intradermique avec de fines aiguilles pour les Skin boosters, ou injections superficielles pour les petites rides, ceci étant ces AH réticulés ne doivent pas être injectés en grosse quantité, pas de visibilité, sous peine de donner suite à de petits nodules affichants pouvant persister des mois. Les injections plus profondes se feront dans l’hypoderme, au-dessus et au-dessous des muscles, en supra périoste et nécessiteront une parfaite connaissance de l’anatomie et le plus souvent l’utilisation d’une canule afin de minimiser le risque d’embol.

Les ES infectieux bactériens sont quasi inexistants aujourd’hui, il faut soit apporter les microbes dans la seringue, ce qui n’est pas possible, sauf manipulation, soit les faire entrer avec l’aiguille, impossible car tout le monde désinfecte. Reste le problème des fake injectors bien sûr. Il est aussi déconseillé de réutiliser une seringue qui a été ouverte, elle n’est plus stérile. Il peut y avoir réactivation ou déclenchement d’un herpès, après quelques jours, facilement pris en charge. Les ES vasculaires très graves sont d’apparition rapide et représentés par les embols vasculaires, bien connus aujourd’hui et de traitement bien codifié. Reste la possibilité d’un embol rétinien, urgence ophtalmique (90 min).

Les signes d’un embol sont assez faciles à reconnaître :

  • Pendant l’injection, douleur intense, tout au moins inhabituelle, car la lidocaïne peut la cacher.
  • La peau blanchit, puis peu à peu un livedo réticulé apparaît dans les heures suivantes.
  • Puis phlyctènes, croutelles, ensuite la peau qui n’est plus vascularisée correctement se nécrose. Il faut essayer de ne pas arriver à ce stade.CAT : La hyase doit être injectée le plus vite possible, pour ne pas laisser de cicatrices, selon le protocole du Dr P.Kestemont et collaborateurs (4).
  • Stade 1 : 1500U / 1 à 5 ml de sérum NACL 0,9% en nappage étendu avec une canule 25G à répéter toutes les 8 h jusqu’à revascularisation normale à la pression
  • Stade 2 : 1500 U toutes les 6 h
  • Stade 3 : 1500 U toutes les 2 h.

Les multiples recommandations sur l’obligation de la plus grande prudence et l’utilisation d’une canule dans les zones à risque, sillon nano génien, glabelle, nez, commencent à porter leurs fruits.

Les ES à type de nodules peuvent suivre des injections :

– Nodules froids rapides : il s’agit souvent d’un excès de produit – CAT : attendre ou hyaluronidase.

– Nodules et/ou oedèmes inflammatoires chauds, rapides ou tardifs, leur origine peut parfois être retrouvée ou suspectée, mais difficilement malgré un interrogatoire :

  • Expositions au chaud.
  • Problèmes dentaires ou de gencives concomitants.
  • Cisaillements musculaires au niveau des muscles masticateurs, temporal et masséter, ou des muscles très forts comme le mentalis ou le masseter.
  • Injections de volumateurs trop superficielles et/ou en trop grosse quantité.
  • Gros stress abaissant l’immunité.

Ces nodules inflammatoires peuvent prendre l’aspect :

  • D’abcès inquiétants, mais stériles. CAT : évacuation du matériau, corticothérapie per os, hyase si persistance de zones contenant de l’AH, LED rouge, suivi journalier.
  • De masses douloureuses au niveau des zones injectées, pas toujours toutes et pas forcément en même temps. Il faut signaler que parfois une extension au-delà des zones peut être révélatrice d’une sarcoïdose.

CAT : corticothérapie per os, hyase une fois par semaine puis, espacement progressif – 1500U à diluer plus ou moins selon la composition de l’AH, moins dilué si très concentré et réticulé. (5). Il n’y a pas de réaction d’hypersensitivité (1) mais, probablement une modification structurelle du gel. La hyaluronidase est le traitement des embols, à injecter le plus vite possible. Souvent utile pour les nodules mais “off label“, les injections seront à renouveler, jusqu’à élimination totale de l’AH, sous peine de récidive (2). 

 

Références / References 1. Immediate nor Delayed type HSV plays a role in LIR after HA fi llers injections – T Decates, J Kadouch – Clinical, cosmetic and investigational dermatology 2021 May 31:14: 581-5892 . Quantitative Correlation Between H A Filler and Hyase. Euna Hwang, MD, PhD and You Seong Song, MD – The Journal of Craniofacial Surgery 2017 3. The interaction between hyaluronidase and hyaluronic acid gel fi llers – a review of the literature and comparative analysis. MK Paap et all. Plast Aesthet Res, 2020; 7:36 4. Management of vascular complications following facial hyaluronic acid injection: High-dose hyaluronidase protocol: A technical note. C Rouanet, P Kestemont, C Winter, B Lerhe, C Savoldelli,* https://doi.org/10.1016/j.jormas.2021.05.014 2468-7855/© 2021 Elsevier Masson SAS. All rights reserved.5. The duration of hyaluronidase and optimal timing of HA fi ller reinjection after hyaluronidase injection. H.J Kim – Journal of Cosmetic and Laser Therapy 2018, VOL 20, NO.1, 52-57 6. Response of twelve different acid gels to varying doses of recombinant human hyaluronidase. C Ryu, J E Lu, S Zhang-Nunes- Journal of Plastic, Reconstructrice & Aesthetic Surgery. April 2021; VOL 74 (4):881-889

Dr Isabelle Rousseaux: Specialist in aesthetic dermatology. President of the DEFEE (Associated Experts in Aesthetic Dermatology) for the Nord region. Member of the French Dermatology Society (SFD). Board member of the LED Academy. Board member of the union of dermatologists. Training manager for assistant dermatologists. Lille Côté Sud dermatology and laser centre.

More informations: lillecotesud.fr 

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